J’ai eu l’occasion de lire un livre qui m’a à la fois intéressée et intriguée. Il s’agit d’un livre de Rachel Hausfater « Un soir, j’ai divorcé de mes parents ». Cette auteure écrit des romans et albums pour la jeunesse.
J’ai été tout d’abord intéressée par l’histoire. Il s’agit d’un ado qui décide de prendre un week-end sur deux pour lui (celui que son père ne peut plus assumer pour cause de déménagement) loin de ses parents divorcés. J’ai beaucoup aimé l’humour avec lequel il a été écrit.
Ce qui m’a intriguée est que ce soit écrit par un adulte, au nom d’un ado, pour décrire ce qu’il se passe dans la tête de ce dernier.
Et c’est sûrement là une des difficultés de l’adolescence. Souvent les adultes, parents, profs, éducateurs, tentent de comprendre ce qu’il se passe dans la tête des ados et interprètent les manifestations qui se donnent à voir. Les ados peuvent se sentir incompris par ces interprétations qui se basent sur le vécu de l’adulte et sa propre compréhension de la vie.
C’est là où les difficultés commencent. Car l’ado lui-même ne comprend pas très bien ce qu’il se passe dans sa tête et dans son corps, car le corps a une place importante à l’adolescence. Ce corps qui se transforme, dont l’ado peut parfois être fier, qui souvent le complexe, trop grand, trop petit, trop ceci, trop cela, il y a souvent du trop. Ce trop, ou trop peu d’ailleurs, se retrouve aussi dans la tête de l’adolescent. Il ne supporte plus les adultes qui l’entourent et qui ne comprennent décidemment rien à la vie, à l’époque, à lui. Et en plus, ils lui donnent des conseils de « vieux », qui ne correspondent plus à rien.
Françoise Dolto parlait de l’adolescence par une métaphore, celle du complexe du homard, qui a perdu sa carapace d’enfant et n’a pas encore celle d’adulte. Il se sent par conséquent bien fragile. Il a à la fois un corps de plus en plus puissant, mais, ne sachant pas encore ses contours, il se retrouve bien maladroit. Les hormones sont en pleine effervescence et sont difficiles à canaliser d’autant plus qu’il peut y avoir des complexes par rapport aux copains du même sexe ou du sexe opposé, une question de performance peut s’immiscer dans les relations aux autres plus intimes avec parfois des images qui n’ont rien à voir avec l’intimité réelle de personnes qui s’apprécient, voire s’aiment, et veulent passer davantage de temps ensemble.
Le cerveau aussi est en pleine ébullition, avec des fulgurances et des moments d’hébétude, suivant les connexions synaptiques qui se créent ou se défont. Les adultes peuvent parfois avoir l’impression que l’ado se moque d’eux, tellement il se montre incapable de faire une opération toute simple, qu’il savait pourtant faire enfant.
En fait, l’adolescence est une période énigmatique pour l’ado qui la vit et les adultes qui l’entourent car c’est une période de mutation, transformation qui induit souvent de l’incompréhension mutuelle. C’est pourtant une période riche et importante à traverser pour le futur adulte en devenir.
C’est aussi un temps qui favorise les passages à l’acte, quels qu’ils soient, car le vécu passe davantage par le corps et le mouvement que par les mots.
C’est une période qui se vit différemment suivant l’adolescent et son entourage. Pour autant c’est un moment où l’ado a besoin de savoir qu’il est entouré, que les adultes autour de lui tiennent à lui et à ce qu’il aille bien, quitte à leur répéter qu’ils le « lâchent », qu’il peut se débrouiller tout seul.
C’est une période aussi très complexe pour les parents et ceux qui vivent auprès des adolescents car cela va leur faire revisiter leur propre adolescence, ses affres, ses joies, ses sentiments. Certains parents vont avoir envie de faire comme leur ado, d’autres de tout leur interdire, d’autres de tout leur autoriser.
Mais dans tout ça, quelle est la juste mesure ?
C'est une période où le lien est mis à mal. C'est le lien aux autres, souvent les adultes et en particuliers aux parents qui peut se retrouver fragilisé. Pourtant c'est souvent à partir de ce lien maintenu, malgré les difficultés, qu'un nouveau tissage de ce lien pourra advenir.
Votre ado, qui vous casse les pieds à longueur de temps, qui passe son temps à dormir, qui oublie de se laver, vous répond de manière très abrupte ou laconique (quand il vous répond), vient manifester ce qu’il vit à l’intérieur de lui, son incompréhension et son inconfort face à la situation qu’il vit, malgré lui, dans son corps et dans sa tête et qui vient même parfois réinterroger sa propre existence.
Il n’y a pas de recette toute prête pour accompagner un adolescent et il n’a pas été livré avec son propre mode d’emploi.
Il s’agit d’un être singulier, unique, sensible, fort et fragile, qui vit un bouleversement comme il n’en vivra pas d’autre dans sa vie. Et ses parents sont uniques, ont leur propre vécu, leurs propres idées sur l’éducation, la culture, la vie.
A des moments l’ado aura besoin d’être rassuré, à d’autres que les limites soient bien posées et respectées, à d’autres encore d’expérimenter ses capacités physiques ou intellectuelles…
Cette période de la vie si particulière peut prendre des formes extrêmement violentes et dangereuses. C’est difficile à vivre pour les parents et pour l’adolescent. Pour autant, lorsque l’enfant semble passer cette période sans aucun problème, tranquillement, sans bruit, sans éclat, il est important de rester attentif car cela cache parfois des souffrances tellement profondes qu’elles ne peuvent s’exprimer. Parfois cela revient tel un boomerang à un âge plus avancé et l’adolescence se vit à une période de la vie où l’adulte devrait être davantage installé dans sa vie. C’est ainsi que certains redeviennent ado tout à coup et prennent des décisions très pulsionnelles.
L’Analyse TriDimensionnelle m’a beaucoup apporté dans la compréhension de cette période de la vie que chacun traverse à sa manière. Cela me permet d’accompagner des adolescents, des parents, des familles, que ce soit pour un travail en profondeur sur ce qu’ils traversent et qui vient remettre sur le devant de la scène des émotions et des vécus plus anciens ou que ce soit à travers le coaching parental pour remettre en perspective une situation particulière.
Quel que soit le cadre dans lequel j’interviens auprès des adolescents ou des familles, le respect de la singularité de chacun est au cœur de mes interventions. Je suis attentive à la compréhension de l’énigme que représente cette période et ce que le corps manifeste quand les mots ne peuvent le dire.
J’accompagne ainsi dans la verbalisation de ce qui peut l’être, dans la créativité de ce qui se montre pour que le lien puisse peu à peu se retrouver ou se tisser.
Pour conclure, je dirai que je tente de favoriser la rencontre de l’adolescent avec son corps, sa tête et son cœur afin qu’il découvre celui qu’il est en train de devenir, unique et singulier, et découvre son humanité. J’accompagne ainsi les familles à rencontrer cet Être Humain en plein remaniement identitaire pour les aider ensemble à traverser cette période de l’adolescence.
Si vous commencez à avoir des difficultés à dialoguer, que vous soyez adolescent ou parent, vous pouvez vous autorisez à vous faire accompagner pour traverser cette période.
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